Livestorm, la solution française de conférence en ligne (une centaine de salarié·es, entre 15 M€ et 20 M€ de revenus annuels récurrents), effectue un virage stratégique de la lead generation vers de la demand generation. Gilles Bertaux, son co-fondateur et PDG, nous en explique les raisons et les conséquences sur les équipes produit et marketing.

 ⌛ 6 min de lecture

🎫 Les membres Premium du Ticket ont un accès intégral à cet article


Ce que tu vas apprendre dans cette interview de Gilles Bertaux (Livestorm) :

1. Une stratégie en self-service ne te permet pas d'aller chercher des grands comptes (qui, parfois, n'ont même pas conscience qu'ils ont un problème)

2. Le problème majeur de la Product-led Growth ? Tu laisses du blé sur la table, certains (gros) clients pourraient payer beaucoup plus !

3. L'approche sales-led implique de sortir de la standardisation à tout prix du produit

4. Passer en demand gen, c'est faire évoluer sa culture (ciblage Sales vs volumétrie Produit) et sa stratégie marketing (Growth vs Branding et événements physiques)


“Lead gen is a traffic light, demand gen is a lighthouse”. C’est par ces mots que Gilles Bertaux conclut sa publication Linkedin, qui a déclenché notre demande d’interview. La principale limite d’une stratégie de génération de prospects selon lui ? Cela implique que son audience : 

1- Sache déjà qu’elle a un problème

2- Comprenne les solutions disponibles sur le marché

3- Et ai identifié votre solution comme une possible réponse à son besoin

Un “triple filtre” qui limite grandement le marché total adressable (TAM). “La lead gen convertit mais cela n’éduque pas votre marché”, insiste-t-il. Problème, dans une démarche de Product-led Growth, où le produit est le premier levier d’acquisition, “nous sommes confortablement installés au sommet de ce marché triplement filtré, sans essayer de creuser plus en profondeur”.

D’où la nouvelle stratégie de son entreprise de se focaliser sur la demand generation, où l’objectif n’est pas de capturer un intérêt mais de le créer. Grâce à une démarche commerciale plus traditionnelle. Et une remise en cause du “tout produit”. Explications.

Bonjour Gilles. Qu’est-ce qui explique ce virage stratégique que vous êtes en train d’opérer chez Livestorm ?

Gilles Bertaux : Livestorm a toujours été très product-led avec beaucoup de self service (NDLR : les utilisateurs peuvent utiliser le produit en autonomie, sans avoir à passer par les Sales). Nos modèles, c’était Dropbox ou Mailchimp.

C’est très bien au demeurant. Sauf que les clients qui passent par ce canal sont en général plutôt des petites et des moyennes entreprises qui vont payer mensuellement. Premier problème : il est difficile de faire de gros contrats de cette manière et il faut donc faire énormément de volumes.

Par ailleurs, les outils en “martech” (= technos dans le secteur du marketing) sont souvent “dispensables”. Ce qui veut dire que tu subis les aléas de tes clients, en fonction de la conjoncture, un peu comme la météo. Tu n’as pas vraiment de contrôle.

Aujourd'hui, on est une boîte rentable et on a envie d’être beaucoup plus dans le contrôle de nos finances mais aussi de nos revenus. D’où notre orientation plus “Sales-led”, où tu sais combien tu es censé faire à la fin de la journée, en ciblant des contrats plus premium.

“En PLG, tu laisses tellement de pognon sur la table !” - Gilles Bertaux, CEO de Livestorm

Ce qui n’est pas possible avec votre démarche historique de Product-led Growth ?

Gilles Bertaux : Tous les mois, nous faisons autour de 4 000 leads grâce au produit (aussi appelés Product Qualified Lead, PQL). Je dirais que 15 % environ entrent dans nos critères de typologie de grandes entreprises visées par les Sales.

Naturellement, il y a une part bien plus importante de TPE/PME qui viennent vers nous de cette façon. Mais les grands comptes, eux, ne tombent pas du ciel. Ce n’est pas avec de l’inbound que tu vas les chercher. Ils ne sont souvent pas au courant que tu existes voire, parfois, n’ont pas conscience d’avoir un problème.

Le discours change en conséquence. Il faut éduquer le marché et ta cible. Ce qui veut dire aller vers elle, et non l’inverse.

Moment autopromo : pour l’achat d’un Roadbook sur la PLG, tu recevras un Roadbook sur la PLG

À quand remonte cette réflexion ?

Gilles Bertaux : On a commencé à se rendre compte de la volatilité des clients en self-service post-covid, début 2021 (NDLR : lors du confinement, Livestorm a triplé son chiffre d’affaires et a levé, en novembre 2020, 25 millions d’euros). On a essayé d’engager nos clients sur des contrats annuels ou pluri-annuels.

Mais ce n’est qu’autour de la mi-2023 qu’on s’est rendu compte que cette stratégie d’inbound et de lead generation n’allait pas le faire et qu’il fallait se concentrer sur de la demand generation. Autrement dit, que pour être rentable à long terme, on devait aller sur le segment de la grande entreprise et donc changer notre fusil d’épaule en termes de marketing.

Cela nous fait penser aux propos récents de Thibaud Elzière (créateur du startup studio Hexa/eFounder) qui dit que même les boîtes symboliques de la PLG, Slack et Notion, auraient pu capturer plus de valeur rapidement en embarquant plus rapidement des Sales. Sous-entendu, qu’il y a comme un dogme produit dans ce type d'entreprise.

Gilles Bertaux : C’est très vrai. Je peux d’autant mieux en parler que je viens d’une culture eFounder à la base. Avant de créer Livestorm, j’étais chez Mention (NDLR : startup née dans le startup studio en 2013). Cet ADN PLG, je ne l’ai pas chopé nulle part !

D’ailleurs, on avait une blague à l’époque : les boîtes eFounders c’est “low ARPA, high churn” (traduction : revenu moyen par compte faible, forte volatilité de la clientèle). Et, typiquement, on emprunte le même chemin que d’autres startups de Hexa avant nous, comme Aircall ou Spendesk, qui ont commencé sur des petits comptes avant de pivoter vers des plus gros.

Le problème de la PLG, c’est la culture très particulière que cela implique.

Avoir le meilleur produit ne suffit pas... - Source Statista

C’est-à-dire ?

Gilles Bertaux : En PLG, le produit est sacro-saint, dans le mauvais sens du terme.

Cet article est réservé aux membres Premium du Ticket.

Le meilleur du Produit pour progresser et faire progresser ton équipe

Le Ticket Premium est lu par les meilleures équipes produit de France …

2 newsletters / mois

Pour connaître l’essentiel tous les 15 jours

L’intégralité des articles et guides

Pour creuser (vraiment) en profondeur les meilleures pratiques de l’écosystème

Le canal de veille Whatsapp

Pour avoir des infos produit régulières en version synthétique

La collection de templates des meilleures équipes produit

Pour éviter de réinventer la roue en permanence

Les fiches de lecture Produit

Pour connaître les enseignements clés d’un bouquin en 10 min