Le cabinet Onepoint organisait le 19 juin dans ses locaux parisiens la 2e édition du ProductInCorp Summit, l’événement pour les responsables produit des grandes organisations privées et publiques. Le Ticket y était. Compte-rendu sans chichi.

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 ✉️ Article issu du Ticket n°113

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“L’âge adulte du produit”. Tel était le thème de cette deuxième édition du ProductInCorp Summit, qui a réuni plus de 300 participants et participantes. Fini la crise d’ado et l’appareil dentaire. Place à la responsabilité et à l'impact tangible.

Un événement qui dénote des traditionnelles conf’. Très peu de prises de parole sur scène et beaucoup d’ateliers pratiques en petits groupes, en mode foire aux post-it, pour davantage d’interactivité. our nous au Ticket, c’est évidemment plus difficile à retranscrire.

D’où notre volonté de faire la part belle dans cette synthèse aux verbatim des discussions, afin que tu puisses t'immerger dans les échanges à bâtons rompus de l’après-midi.

Crédit : Linkedin de Julien Laforêt de Onepoint

TL;DR - Ce que tu vas apprendre dans cette synthèse de ProductinCorp 2025 : 

1- Exploration et excellence : les 2 dimensions d’une transfo

2- Recrutement : “Comme de la dette technique, on peut accumuler de la dette de diversité”

3- Les 5 leçons que les Product Managers (software) peuvent apprendre de leurs collègues du hardware

4- L’importance de la culture financière pour une équipe produit

🎫 5- La discussion IA de la journée - “Les hallucinations ne sont pas un bug, c’est une fonctionnalité de l’IA !”

🎫 6- “France Travail est une entreprise à la fois profondément technologique et humaine”


1- Exploration et Excellence : Les 2 dimensions d’une transfo

On commence par la slide de la journée : 

Sur scène, Raphaël Viard, le Chief Digital Officer de Bouygues Construction, ouvre les festivités en évoquant les deux grands domaines d’une transfo numérique : 

  • “Core” / excellence opérationnelle : comment le numérique aide à mieux faire ce qui est déjà fait (pour Bouygues, être meilleur sur ses chantiers)
  • “Explore” / Différenciation & Diversification : comment le numérique permet d’aller chercher de nouveaux marchés

Le fameux “Run” et “Build”. Une stratégie qui repose : 

  • sur des fondations “qui représentent 90 % des investissements et du staff”
  • et des “enablers” technologiques (IA, Data platform etc.) et méthodologiques (startup studio, UX Design…)

Sa conviction forte en la matière (qui va faire réagir) ? Séparer les équipes produit des SI et créer une orga à deux vitesses. “Pour avoir beaucoup expérimenté, c’est finalement la méthode la plus efficace”, assure-t-il.

Autrement dit, ne pas étouffer les initiatives du domaine “explore”, des sortes de startups internes, par les process internes du core business. 

En guise d’argumentaire, il affiche une citation du fondateur du Forum de Davos, Klaus Schwab : “Dans le nouveau monde, ce n’est pas le gros poisson qui mange le petit. C’est le poisson rapide qui mange le lent”. Fish & Ship (👉🚪).

2- ProductinCorp & Recrutement : “Comme de la dette technique, on peut accumuler de la dette de diversité”

Pour notre premier atelier de la journée, on a opté pour un échange sur la diversité et l’inclusion. L’occasion de découvrir le nouveau référentiel de critères d’évaluation du leadership chez Pluxee… qui comprend une dimension d’inclusivité.

“L’idée, c’est de marquer le coup pour qu’il y ait au moins une prise de conscience et de remettre en question de potentiels biais que l’on peut avoir”, confie Julie Renaut, sa VP Employee Benefits & Engagement.

Parmi les autres points abordés dans la discussion avec l’ensemble des participants et participantes, on a notamment retenu :

  • Les biais de recrutement, qui peuvent arriver dès la rédaction d’une fiche de poste ou en privilégiant son réseau par exemple
  • La difficulté de recruter des profils atypiques qui ne cochent pas toutes les cases. “J’ai essayé à mes débuts d’en inclure dans mes short lists pour mes clients. Sincèrement, j’ai abandonné depuis. Les entreprises ont besoin d’aller vite et d’être rassurées en privilégiant des profils similaires à ceux qu'elles ont déjà”, déplore Marion Darnet de Pachamama, la spécialiste du recrutement Product. 
  • La diversité, c’est comme la culture produit, cela réclame une vigilance permanente. “Cela prend une vraie volonté personnelle des leaders. Mais il peut y avoir des retours en arrière”
  • Les quinquagénaires subissent plus de rejets que des trentenaires. “Ça se voit et ça se sent. Lors d’un entretien, on m’a par exemple demandé si j’étais capable de venir boire des bières avec le reste de l’équipe !”
Crédit : Linkedin de Julien Laforêt de Onepoint

3- La discussion business de ProductInCorp : L’importance de la culture financière pour une équipe produit

De cet atelier sur le rapprochement entre produit et business, on retiendra ces quelques éléments de Gabriel Szanto, senior VP Product de Contentsquare et ex Accor : 

  • “Avoir un langage commun en interne facilite les échanges. Parler de discovery ou d’itérations, c’est bien pour les équipes produit; mais cela reste souvent abstrait pour d’autres départements. En revanche, parler de marge, de revenus nets ou de ROI, ce sont des concepts qui parlent à tout le monde et permettent de mieux collaborer.”
  • “Trouver une métaphore qui parle à tout le monde permet d’élever le débat. Chez Accor, on disait souvent : “Notre objectif est de remplir 800 000 chambres chaque soir.” Cela donne un cadre clair et concret pour expliquer comment le numérique peut contribuer à cet objectif global.”
  • “Améliorer de 0,1% le taux de transfo du funnel d’Accor, c’est près de 100 M€ de CA supplémentaire par an… Ça fait tout de suite réfléchir les parties prenantes qui challengent les priorités pour faire passer leurs fonctionnalités »

4- Les 6 leçons que les Product Managers (software) peuvent apprendre de leurs collègues du hardware

On l’avoue, on a eu peur en entrant dans la petite salle de cet atelier. Notre crainte ? Un n-ième débat sur la différence entre produit physique et numérique. “Les délais d’itération sont plus longs”, “il faut plus planifier”, blablabla…

Et bien on a été déçu en bien (comme on dit chez nos amis suisses) ! Olivia Hildebrand, ex product Manager de Logitech (le fabricant informatique) et de Ledger (portefeuilles cryptos physiques) et Benoît Terpereau, ex Chief Product Officer des conteuses audio Lunii ont certes rappelé les différences entre ces deux mondes. 

Mais en montrant comment le monde du produit historique pouvait servir d’inspiration à son jeune (et parfois un peu vaniteux) cousin. En pointant certaines incongruités. Voici 6 morceaux choisis : 

1- La double source

Dans le monde industriel, on essaie de ne jamais dépendre d’un seul fournisseur pour un même composant. C’est ce qu’on appelle la “double source” (ou dual sourcing) en supply chain.

“Dans le numérique, on considère que toutes nos ressources ne bougeront jamais et que tout est acquis. Mais qui dit que la loi ne va pas vous obliger un jour à changer de provider cloud ou que la startup qui fournit une brique à votre produit ne va pas pivoter ? Cette anticipation par nature du hardware peut être une source d’inspiration…”

2- Le cadrage du retour sur investissement avant la conception

C’est LA prise de conscience troublante de cet atelier. On ne lance pas un produit physique sans business plan. Au moins en chiffrant en amont le coût des composants (le “BOM” pour “bill of material”). Une démarche (vraiment) loin d’être courante dans le monde du software, comme si les contraintes budgétaires n’existaient pas !

“On a très peu la réflexion sur le coût de revient, de conception ou de maintenance d’un produit numérique. Comme si on avait oublié que cela coûtait de l’argent. C’est quand même étonnant qu’on engage un million d’euros par an pour une équipe produit sans jamais n’avoir rien à justifier. Je caricature à peine. J’ai encore récemment un Product Manager qui m’a dit qu’il n’était pas en capacité de m’estimer un coût ou un revenu potentiel autant en amont. C’est pourtant aussi compliqué dans le hardware mais on y arrive en prenant des hypothèses médiane, haute et basse”.

3- Le suivi de la qualité

L’usine est évidemment une partie prenante essentielle d’un produit physique. Et pour cause : un problème de qualité a des conséquences considérables, que cela soit en production ou dans la gestion des retours et des réparations, une fois mis sur le marché. D’où des indicateurs de suivi de la qualité très poussés (% de défaut, % d’échec en sortie de banc de test…).

“Il y a très peu de boîtes qui mesurent les bugs à la fin de nos sprints, comme on le fait dans les usines. En conséquence, on ne peut pas mettre en place des mesures correctives pour améliorer la qualité, comme on regarde le “bac rouge” dans une chaîne industrielle”.

(Ce que fait au passage Qonto qui a repris les codes du Lean Management de… Toyota !)

4- Les “ingénieurs méthode”

Quand une ligne de production est créée, ce rôle sert à documenter le processus afin que tout le monde sache ce qu’il doit y faire (surtout si l’unité fonctionne en 3x8).

“Comment se fait-il que nous, on ne donne de notice à personne ? On n’a pas de méthode comme on est un métier nouveau et c’est un rôle qu’on a perdu en chemin”

Les 46 intervenants et intervenantes de la journée (dont tes plus fidèles serviteurs - au fond de la classe) - Crédit : Linkedin de Julien Laforêt de Onepoint

5- La gestion des ressources

Le hardware résonne dans un monde de ressources finies et de frugalité. Tout simplement car chaque composant a une valeur tangible. Être éco-responsable rime avec économie financière.

“Dans le numérique, on vient d’un monde infini. Combien consomme notre applicatif nous passe au-dessus de la tête. Il est toutefois probable qu’un jour on nous demande des comptes. Surtout dans le cloud, où le fait d’être énergivore représente un coût pour l’entreprise”

6- Le respect des obligations réglementaires

Les responsables de produits physiques passent beaucoup de temps avec l’équipe juridique, afin d’être en conformité avec les normes et législations. Dans le software… moins ;)

“La majeure partie du temps, on ne leur parle jamais. Or, quand on déploie un applicatif, on prend une forme de responsabilité. Les normes ? On ne les regarde pas, on ne se forme pas dessus voire on ne les applique pas. Sur la partie accessibilité par exemple, je pense qu’un jour ça va nous tomber dessus”

À retenir : les équipes produit software peuvent s’inspirer de la rigueur et l’anticipation de leurs comparses du hardware qui ont :

  • une vision systémique et séquencée
  • une responsabilité totale du cycle de vie de leur produit
  • une gestion rigoureuse des risques critiques
Un événement sans THÉorie

🎫 La discussion IA de ProductInCorp - "L’indicateur d’adoption ne doit pas être 1 ping d’un agent IA par semaine, il faut viser les 3 heures par jour !"

Mais, mais, mais… Une conf produit sans parler d’IA ?! Rassure-toi (ou pas), c’était le thème de notre dernier atelier de la journée, animé par Benjamin Rey, directeur intelligence artificielle de Adeo et Tristan Charvillat, ex VP design de BlaBlaCar et Malt et co-créateur de la méthode Discovery Discipline… et de la nouvelle communauté AI Discipline.

Un grand (grand) prescripteur de l’IA, comme on avait déjà pu s’en rendre compte lors de l’IA Product Day en mars dernier, et lors de son propos liminaire : 

  • “L’IA sert dans 3 perspectives : pour les clients, pour son produit et pour l'efficacité des équipes. Dans ce dernier cas, l’indicateur d’adoption ne doit pas être 1 ping d’un agent IA par personne par semaine, il faut viser les 3 heures par jour !”

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