Pixmania, EasyRoommate à Londres, LeGuide, sa propre boîte, OpenClassrooms… Voici une quinzaine d’années que Pierre Hoellinger écume le monde de la tech. Aujourd’hui Principal Product Manager de la licorne Payfit, logiciel de paie et RH, il raconte ses attributions de contributeur individuel.

Cet article fait partie de notre dossier sur les contributeurs individuels que voici.

Salut Pierre. Peux-tu nous raconter ce qui t’a amené à devenir Principal PM chez Payfit depuis plus de 2 ans ?

Pierre Hoellinger : Je dirais que j’ai toujours été attiré par l’expertise et le fait d’entrer avec précision dans le cœur d’un sujet. Dit autrement : j’aime bien faire des choses par moi-même et d’avoir comme récompense l’aboutissement de mon travail. Un peu comme un artisan en fait.

Et tout au long de mon parcours à date, j’ai toujours évolué autour de ces missions de contributeur individuel, que cela soit dans le produit mais aussi la gestion de projet ou le référencement naturel.

L’opportunité de rejoindre Payfit sur ce poste n’était pourtant pas très préméditée…

C’est-à-dire ?

P.H. : J’étais, à l’époque, Product Manager Senior chez OpenClassrooms. Je suis chassé en novembre 2019 pour un poste de PM Senior chez Payfit, qui vient de lever 70 M€ (NDLR : La solution de gestion de paie a refait un tour de table à 254 M€ début janvier, devenant ainsi une licorne).

Les entretiens se passent bien et Sébastien Levaillant, son VP Produit, me dit que j’ai les capacités pour faire plus que Senior PM. Mais le poste de directeur produit vient d’être pourvu à l’interne. Il me parle alors d’un poste en cours de construction qui n’existe pas encore : Principal PM. Et me dit de me renseigner sur le sujet et de voir à quoi cela peut correspondre.

Tu connaissais ce poste ? 

P.H. : J’en avais déjà entendu parler mais je ne l’avais encore jamais vu en France. Et, en gros, j’ai contribué à la rédaction de ma fiche de poste à mon arrivée !

« Au début, je me présentais juste en tant que PM. Je manquais d’assurance dans ce rôle et je ne voulais pas que les gens se demandent ce que ça veut dire “Principal” » (Pierre Hoellinger)

Comment il t’en a parlé lors de ton entretien ?

P.H. : Il a évoqué la notion de contributeur individuel, a contrario de celle de management. Avec une notion de partage d’expertise au sein de l’entreprise. Ça m’a tout de suite parlé.

Il m’a aussi dit que ce poste était plus exigeant que celui de PM Senior, donc que l’attente serait plus élevée. Mais j’aime bien tester de nouvelles choses donc cela m’allait très bien !

Et comment cela s’est passé à ton arrivée, en février 2020 ?

P.H. : J’ai intégré une squad produit et on m’a dit d’y consacrer environ 60 % de mon temps. Les 40 % restants devaient plutôt être dédiés au partage de connaissances avec les autres PM. J’ai donc commencé par prendre mes marques dans la squad et discuter avec les PM de Payfit, sans trop intervenir dans leur travail. 

Puis, petit à petit, je me suis positionné en tant que Principal en apportant mon expérience à certaines personnes. Je n’intervenais pas en mode professeur pour expliquer comment on monte une roadmap, comment on fait du produit ou quelle est la méthodo en double diamant. Mais plutôt en donnant des conseils pratiques ponctuels. Par exemple sur les phases de discovery, sur les enjeux de priorisation ou sur la prise de recul devant certaines méthodes.

Aujourd’hui, est-ce que tu as avancé sur la formalisation de ton rôle de Principal PM ?

P.H. : Oui. Déjà, on a identifié 4 familles de compétences pour les gens qui font du produit chez Payfit, qui sont à la base de notre parcours carrière :

  • Compréhension : Être capable de bien comprendre ses utilisateurs (capacité à leur parler, avoir de l’empathie etc.)
  • Stratégie : Pouvoir construire une vision et avoir de l’impact côté business
  • Exécution : Être en mesure de prendre un problème, le définir et itérer dessus. Puis de mener la phase de delivery en mettant l’accent sur l’excellence de la qualité du produit.
  • Leadership : Savoir coacher d’autres PM sur les méthodologies et les process, exprimer son opinion et faire briller l’orga voire être capable d’inspirer d’autres équipes en dehors de Payfit. Sans oublier la gestion des parties prenantes et le management up (contribuer à la vision produit au niveau du top management).

Pour mon rôle spécifiquement, mon travail est réparti en 3 grandes tâches :

1) La gestion des initiatives de ma squad

Un travail de PM classique. A la différence que j’ai des sujets plus transverses et que cela demande une plus grande collaboration.

Il m’arrive aussi de mettre à disposition mes compétences sur des projets ponctuels. Par exemple, on développe la signature électronique mais on n’avait pas de PM dédié. Je ne gère ici ni la squad ni le suivi du delivery. Mais je travaille sur la réponse au besoin de notre cible, la timeline du projet, le go-to-market etc. L’idée, c’est de pouvoir bootstrapper avec une petite équipe afin d’itérer rapidement dessus. 

2) La contribution au développement de l’orga de Payfit

Je propose ici mon expertise sur les sujets de product Ops. Très concrètement, je suis consulté en tant qu’utilisateur clé. Autrement dit, je suis comme un stakeholder pour l’équipe Product Ops (NDLR : on vous conseille un très bon dossier sur les ops dans le produit #OnSeFaitPéterLesBretelles).

Là, par exemple, on réfléchit à la mise en place de l’outil Product Board. Quand on est une quinzaine de squads, il faut bien réfléchir à comment tu organises tes boards de manière cohérente. Je participe ainsi à la réflexion.

3) Le coaching

Je suis en effet mentor auprès d’un PM et j’en coache un autre par intermittence. En plus de cela, je partage de la connaissance pendant les rituels entre PM.

Par exemple, on utilise Amplitude mais les product ops se sont rendus compte que son adoption était relativement faible au sein des équipes. Ils m’ont ainsi demandé de faire un webinaire pour expliquer comment je l’utilisais. En mode étude de cas et réponses aux questions.

Quelle est la réaction des autres PM ? Est-ce que tout le monde comprend ton rôle ?

P.H. : Au début, je me présentais juste en tant que PM. Je manquais d’assurance dans ce rôle et je ne voulais pas que les gens se demandent ce que ça veut dire “Principal”.

Maintenant, en tout cas depuis janvier 2021, soit un an après ma prise de poste, j’ai moins d’appréhension à le dire. Certes, je vois bien sur leur visage que cela suscite parfois des interrogations. Surtout auprès des juniors. Mais ils se renseignent vite après.

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Quid des enjeux d’égo et de reconnaissance comparativement à des personnes de la même expérience mais qui occupent des rôles de manager ?

P.H. : Chez Payfit, nous avons un parcours carrière dans lequel les directeurs produit sont au même niveau que les principal PM. Les compétences sont différentes mais la grille de salaire est quasiment identique. Personnellement, je ne ressens aucun problème d’égo.

Bon, dans les faits, mon manager, c’est un directeur produit. Mais, dès le départ, il m’a dit : “Je ne vais pas t’apprendre le métier de PM et je te vois plus comme un partenaire business”. De fait, il me laisse autonome, compte sur moi pour lui remonter les problèmes et les opportunités. Et moi, j’attends de lui qu’il fasse remonter les infos auprès du top management.

Quelle évolution pour vos salariés qui rejettent le management ?
Un article de Payfit qui parle des deux possibles parcours carrière #MiseEnAbyme

Comment tu vois l’évolution du rôle de Principal PM au sein de l’écosystème français ?

P.H. : Je pense que le poste est très lié à l’orga dans laquelle tu es. J’ai été contacté pour des postes de PM Sénior qui correspondaient un peu à ce poste de Principal PM. Je sais qu’aux Etats-Unis, c’est beaucoup occupé par des personnes en fin de carrière. Ce qui n’est pas mon cas ! (rires) 

J’ai encore beaucoup à apprendre et, chez Payfit, il existe de toute façon des ponts pour devenir manager. Très concrètement, je pense que mon rôle va évoluer pour tendre vers plus de partage de connaissances et de coaching. Et que je vais faire 2 jours dans la squad et 3 jours de projets transverses. Plus une orga grandit et plus il est nécessaire d’avoir des personnes qui aident à structurer les choses.

Même si je dois admettre que, ce qui est difficile en tant que principal, c’est d’arriver à trouver l’équilibre. Tu peux très facilement te faire aspirer par les tâches de ta squad…

A ton avis, à quel moment est-il pertinent pour une orga de se doter d’une personne Principal PM ?

P.H. : C’est évident qu’il faut atteindre un certain stade de maturité. Au départ, les PM discutent beaucoup ensemble. Je dirais qu’il faut introduire le ou la Principal PM (voire design ou ingé d’ailleurs) au moment où tu as besoin de diffuser ta culture produit à plus grande échelle au sein des équipes.

C’est-à-dire quand tu sens que tu peux la perdre ou qu’il y a besoin de la rationaliser. A un stade où il est difficile de s’assurer que tout le monde évolue dans le même sens.


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