💡 Cet article fait partie de la Collection Arriver à la parité dans son orga produit

En février 2021, Laure Nilles, Lead Product Manager chez MeilleursAgents publiait un article sur le product management et la mixité. Dans lequel intervient Christopher Parola, le CPO de la plateforme. On les a donc interrogés elle (l’interview est ici) et lui, en marge de l’article qu’on a fait sur les impact teams de MeilleursAgents.

Depuis quand es-tu sensibilisé à ces enjeux de parité et de mixité dans le produit ?

Christopher Parola : Franchement, je pense qu’en 2021, on est tous convaincu de l’importance de cet enjeu. Personnellement, j’ai conscience depuis longtemps qu’il y a une inégalité homme / femme anormale. Par contre, j’ai mis du temps à me dire : j’ai mon mot à dire et je peux être acteur de ça.

Qu’est-ce qui t’a fait franchir le pas ?

C.P. : L’un des premiers chocs pour moi, ça a été à mes débuts chez MeilleursAgents. J’avais proposé de faire un club lecture le soir, à 18h, tous les mois. Au bout du 6e, il y a une designeuse de l’équipe qui vient me voir et me dit :

« Christopher, je suis embêtée parce que j’adore ce truc. Sauf que moi, ma fille est à la crèche, je suis mère célibataire et à 18h, je n’ai pas le choix, je dois y aller”. 

Donc en fait, je me suis rendu compte que pendant 6 mois, je venais d’exclure une personne d’un process de l’équipe. Ça a été un déclencheur pour moi. Je me suis dit : intellectuellement, je suis d’accord avec l’anormalité de ce problème mais à quoi bon puisque moi-même je ne fais pas attention !

D’autant que, quelques mois plus tard, ma compagne était enceinte… Et j’ai réalisé tout le bazar que c’était. En parallèle, Laure Nilles m’a aussi conseillé un bouquin qui s’appelle Invisible Women

« J’avais beau me dire qu’il fallait faire attention aux biais… je n’étais clairement pas informé et, oui, j’ai dû inconsciemment favoriser des hommes »

Et ?

C.P. : Et bien, dès l’intro, l’auteure explique qu’il y a plus d’études scientifiques sur le viagra qu’il n’y en a jamais eu sur l’accouchement et l’allaitement inclus ! Une fois que tu as vu ça et que tu as compris que tu as fait des erreurs, tu essaies de voir comment tu peux changer les choses.

Par exemple ?

C.P. : On peut parler de l’écriture inclusive, dont Laure parle dans son article. Franchement, je n’étais pas pour au début. Je me rappelle vers 2014, quand il y avait des débats sur ce sujet, je faisais clairement partie des gens qui disaient qu’il ne fallait pas toucher à la langue française.

Sauf que je n’écris pas de la prose mais des descriptions de poste ! Qu’est-ce que cela me coûte ? D’autant que, quand on a commencé à écrire de manière inclusive, on a tout de suite eu plus de femmes dans nos processus de recrutement. Dont certaines qui nous ont directement écrit pour nous dire qu’elles avaient apprécié de se sentir incluses en lisant notre offre.  

Idem quand on a mis en place nos parcours carrière avec des grilles salariales. Certes, on n’était pas spécialement inégalitaire… mais c’est facile à dire, on n’avait qu’une femme dans l’équipe !

Tu parles de recrutement. Est-ce que, avec du recul, tu penses avoir écarté des femmes sans t’en rendre compte par le passé ?

C.P. : Quand je me revois genre 4 ans en arrière, j’avais beau me dire qu’il fallait faire attention aux biais… mais je n’étais clairement pas informé et, oui, j’ai dû inconsciemment favoriser des hommes.

Mais, au final, je suis content qu’on ait réussi à atteindre la parité non pas grâce à des quotas. On n’a jamais donné la directive de ne recruter que des femmes. Mais plutôt en enlevant des barrières dans nos annonces et dans nos façons de faire. 

A quoi fais-tu attention désormais en entretien ?

C.P. : Je vais vous raconter une anecdote. On a fait une offre pour un travail très axé international où il fallait être bilingue anglais. Les hommes nous affirmaient tous que ça allait. Une femme est venue et elle nous dit que son niveau d’anglais était bof. Sauf que quand tu l’entends, elle te fait rougir ! Je lui demande comment ça se fait qu’elle parle aussi bien anglais : elle répond que sa mère est prof d’anglais ! Et après elle dit bof…

Comme s’il y avait une marge d’autocensure moins importante pour les hommes que les femmes face aux compétences requises pour un poste. 

Et on ne parle pas des salaires. Il n’est pas rare que les femmes demandent 20 à 30 % de moins que les hommes. Cela m’est d’ailleurs arrivé de donner plus tellement c’était indécent ce que l’on me demandait.

On apprend dans l’article de Laure que vous avez fait appel à une agence (Gloria) pour sensibiliser les équipes à ces enjeux de diversité. Tu peux nous en dire un mot ?

C.P. : On a en effet formé les 400 personnes de la boîte. Mine de rien, ça envoie un signal ! Ce n’était qu’une introduction mais au moins, désormais, on peut en parler entre nous. Et s’il y a une blague limite, les gens se sentent à l’aise de le dire. Un peu comme si on avait établi une norme sur le lieu de travail. 

Côté RH, on a aussi nommé une personne chargée de ces sujets, vers qui tu peux aller te tourner si tu as une chose à signaler. C’est tout bête mais ça n’existait pas avant et, en vrai, si je voyais un truc sexiste auparavant, je ne sais pas ce que j’aurais dû faire. Là, le processus est clair. 

Il y a une citation qui dit : “La culture d’une boîte, c’est la somme des actions qu’on y fait”. Autrement dit, c’est le chemin qui compte. On a fait appel par exemple à un service qui va aider les salariés à trouver une place en crèche (Ma bonne fée). Quand tu mets en place ce genre de mesures, tu participes à rendre ta boîte plus inclusive.

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