Chief Marketing Officer d’une startup, Product Marketing Manager chez Qonto puis Alan, aujourd’hui Product Marketing Lead du logiciel de gestion de planning Skello… En plus de son parcours déjà bien riche, Lucie Casamitjana a lancé le 1er Meetup en France sur le Product Marketing en 2019. Discussion avec une pionnière.

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🔗 Cet article est l’épisode 2 de notre Collection « Product Marketing – Découvrir les fondamentaux »

Salut Lucie. Commençons par ton parcours. Par quelle voie es-tu arrivée au Product Marketing ?

Lucie Casamitjana : Franchement, rien ne m’y prédestinait ! Après un parcours école de commerce, j’ai commencé par un premier job de marketing IT et conduite du changement chez GRDF. J’ai découvert et adoré cet univers tech.

Après un passage au marketing dans une startup, j’ai postulé chez Qonto, à la base aussi pour un poste marketing. Et la VP People me dit alors : “Mais en fait, toi, tu fais du Product Marketing !” J’ai donc découvert ce rôle lors de mes entretiens… et c’est comme ça que je me retrouve à monter le Product Marketing chez Qonto en 2018 !

En fait, je venais de mettre un nom sur le métier que je voulais faire. Mais je n’étais pas la seule. Lors du 1er Meetup sur le sujet en France, le 12 septembre 2019, beaucoup de personnes ont pris conscience qu’elles faisaient du Product Marketing, sans le savoir.

Lucie Casamitjana
« Au Product Marketing, Ton rôle, c’est d’apporter de la connaissance marché au produit et d’apporter le produit sur le marché » (Lucie Casamitjana)

Puis, deux ans et demi plus tard, tu rejoins Alan.

L.C. : Oui, je voulais découvrir une boîte et une culture complètement différentes et, surtout, l’autre pendant de mon métier. Chez Qonto, c’était très Product-Led. Le produit était très simple à comprendre, il n’y avait que trois Sales donc je n’avais pas un rôle de Sales enablement mais plutôt d’aide à l’upsell ou au cross-sell, en favorisant la rétention ou la notoriété.

Chez Alan, c’était beaucoup plus Sales-Led et il y avait de gros enjeux de formations et de Sales enablement. Parmi les trois PMM de l’équipe, deux venaient des ventes d’ailleurs. J’y ai mis en place un projet de feedback loop pour collecter les besoins terrain et les faire remonter côté produit. 

Et enfin, depuis juin 2022, tu arrives chez Skello en tant que Product Marketing Lead. Comment est constituée ton équipe ?

L.C. : C’est très lié à mon parcours. Il y a 3 Product Marketing Managers, dont moi, qui suis lead et contributrice individuelle à la fois. Et 3 personnes en Enablement, une partie dédiée à la connaissance produit (comment tu la développes au sein de la boîte) et une partie à la connaissance des Sales (techniques de vente, pitch etc.).

On a en effet un produit complexe chez Skello avec des enjeux autour du droit social et du temps de travail donc cela nécessite beaucoup de formations. C’est une chose à avoir en tête : la complexité de ton produit influence fortement la mission des PMM et la nécessité ou non de faire beaucoup d’enablement.

Justement, quelles sont selon toi les attributions du Product Marketing ?

L.C. : Je dirais que l’enablement, c’est-à-dire la formation du terrain, figure tout au bout de la chaîne. Et ensuite pour le Product Marketing à proprement parler, soit tu figures en bout de chaîne, soit tu fais partie intégrante du cycle de développement produit.

J’ai fait les deux et, pour moi, ce qui marche, c’est d’intégrer les PMM au sein d’une équipe produit. Il n’y a aucune raison d’être juste en bout de chaîne pour diffuser de l’info. Ton rôle, ce n’est pas ça. Ton rôle, c’est d’apporter de la connaissance marché au produit et d’apporter le produit sur le marché. Sinon, tu vas lancer un produit à côté de la plaque. Il y a une vraie dimension stratégique.

Parfois, c’est une mission que font les PM. Mais cela prend énormément de temps et ce ne sont pas les mêmes compétences que le Product Management pur. Ça ne veut pas dire qu’ils ne peuvent pas le faire. Mais ce ne sont juste pas les personnes les mieux placées pour le faire.

Qu’est-ce que cela sous-entend en termes d’actions concrètes des PMM ?

L.C. : Concrètement, cela passe par une analyse approfondie de la concurrence et des prix, de la mesure de la willigness to pay des utilisateurs… On intervient dès la phase de Discovery, en ne cherchant pas les mêmes choses que les Product Managers ou les Product Designers.

Si tu n’inclus pas de PMM dans cette phase de recherche, tu ne sortiras jamais tes préférences utilisateurs. Tu sauras quel problème résoudre et comment y arriver, mais pas la manière de construire ta proposition de valeur. En fait, il faut connaître la valeur que tu as envie d’apporter à tes utilisateurs AVANT de partir sur une solution. Sinon, cas classique, tu arrives en bout de chaîne avec une solution finalisée… mais qui est invendable car elle ne répond pas au bénéfice client attendu.

Passons à la fameuse question qui revient sans cesse : le Product Marketing doit-il se situer dans l’équipe produit ou marketing ?

L.C. : Il faut savoir que chez Qonto, j’étais au produit, sous le CPO. Et, chez Alan, plus côté marketing, sous le Chief Revenue Officer. 

Sur cette question, j’ai une préférence personnelle. Quand je suis partie de chez Alan, je voulais revenir dans une équipe produit, ce qui n’est pas facile car les postes y sont encore rares. Car, ce que tu observes, c’est que plus le PMM devient mature, plus il remonte la chaîne de valeur et devient full stack, plus il doit être dans l’équipe produit. C’est plus difficile, quand tu es loin de la valeur, d’apporter de la connaissance marché au produit et de collaborer sur de la discovery.

Mais cela dépend du rôle que tu donnes à tes PMM. Si c’est faire des e-mails et de l’enablement, il n’y a aucune raison de les mettre au produit. C’est pourquoi, en fait, la vraie question, c’est de définir la mission qui répond à ton besoin. C’est aussi ce qui te permettras de trouver le bon profil de PMM, car, là encore, il y a de tout sur le marché. Parachuter un PMM qui n’a jamais travaillé dans une équipe produit sous un ou une CPO, ça peut être douloureux.

Moi, mes armes, je les ai faites dans des équipes produit donc c’est là où je me sens bien et où je me sens le plus utile. Mais les deux se valent. Par exemple, chez Alan, cela n’avait aucun sens d’être côté produit, c’était trop éloigné du besoin que j’étais en train de résoudre.

Pour résumer, c’est très lié à la strat’ de la boîte : Product-Led VS Sales-Led. Et quels sont les rôles et les missions attribués au PMM. 

On a parlé du lien avec les Product Managers. Quid de celui avec le marketing ? En quoi ton rôle diffère de ce qu’ils font ?

L.C. : J’ai des compétences en marketing mais je reste une généraliste. Je comprends leurs enjeux mais je ne suis pas experte. Je suis incapable de définir une stratégie SEO ou d’acquisition publicitaire par exemple. Mais il n’y a pas que le marketing.

Pour moi, le PMM, c’est un rond point avec 4 entrées : le produit, les Sales, le support client et le marketing. Nous, on fait les vases communicants avec ces personnes. D’où l’importance de bien regarder les soft skills quand on recrute un ou une PMM. 

C’est hyper énergivore comme métier. Il faut aimer parler aux gens, être tout le temps positif et de bonne humeur. Ton rôle, c’est en effet de créer le FOMO autour de ton produit. De faire en sorte que les Sales soient trop chauds pour le vendre, que le marketing ou les CSM aient envie de s’y investir… Autrement dit, que tout le monde ait envie de venir sur le rond point !


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